À chaque fois que je partage nos lectures pour enfant, il y a quelqu’un pour me demander : "Mais TOI, que lis-tu ?" Une sorte de pudeur m’empêche souvent de répondre à cette question – je n’aime pas trop raconter ma vie, en fait, et je trouve que nos lectures nous définissent … beaucoup, peut-être trop !😊
A tel point d’ailleurs qu’un livre est souvent une vitrine. Vous entrez dans un bar ? Posez votre roman en cours bien en évidence sur votre table, il sera un peu comme une étiquette. Beaucoup de gens le font pour cette raison, je pense, plus ou moins consciente. De même, sur les réseaux sociaux, on voit se multiplier des posts d’une simplicité extrême : une photo du livre en cours, sans aucun commentaire ou retour. « Je lis ça », est visiblement un énoncé qui se suffit à lui-même.
Je sais donc que si je partage mes lectures, je m'enferme, du même coup, dans une sorte de stéréotype de moi-même. C'est pourquoi j’ai réfléchi longtemps avant de me décider, mais je me dis que je n'ai pas grand chose à perdre à tenter la chose sur quelques mois. Quitte à tout arrêter si je commence à m'asphyxier moi-même. 😊
D'un autre côté, réaliser une synthèse de chaque lecture est un exercice intellectuel intéressant, et qui permet de garder trace. Il me semble que j'aurai plaisir à revenir à mes notes - parce que mes lectures tissent mon rapport au monde (et ma parentalité en particulier) au jour le jour. D’ailleurs, vous verrez, les 3/4 des livres que je lis concernent l’éducation de près ou de loin.😉
Ah, ça y est. Vous les voyez venir ? Stéréotype et Asphyxie.
Je sais donc que si je partage mes lectures, je m'enferme, du même coup, dans une sorte de stéréotype de moi-même. C'est pourquoi j’ai réfléchi longtemps avant de me décider, mais je me dis que je n'ai pas grand chose à perdre à tenter la chose sur quelques mois. Quitte à tout arrêter si je commence à m'asphyxier moi-même. 😊
D'un autre côté, réaliser une synthèse de chaque lecture est un exercice intellectuel intéressant, et qui permet de garder trace. Il me semble que j'aurai plaisir à revenir à mes notes - parce que mes lectures tissent mon rapport au monde (et ma parentalité en particulier) au jour le jour. D’ailleurs, vous verrez, les 3/4 des livres que je lis concernent l’éducation de près ou de loin.😉
Ah, ça y est. Vous les voyez venir ? Stéréotype et Asphyxie.
Tant pis. Hier, j'ai terminé :
J’aime bien Pierre Rabhi. Je crois qu’il est l’un des seuls penseurs de notre situation socio-économique à replacer le débat dans le cadre qui est le sien : le Cosmos. La partie de l’ouvrage intitulée « La Symphonie de la Terre » est à couper le souffle. Pour moi, c’est le genre de vision qui me fait du bien. Car enfin, mon seul réconfort dans le fait que l’Homme soit en train de se suicider (enfin, de suicider ses enfants) est de penser que l’Univers n’en a cure. Que les corps célestes continueront leur danse froide et glacée, silencieuse, à la fois d’une extrême paix et d’une extrême violence, et que l'Humanité ne leur fait même pas l’effet d’une piqûre de puce.
« On peut imaginer le regard des cosmonautes dirigé vers la sphère mère, suspendue dans le firmament comme un véritable joyau avec ses reflets, ses couleurs évanescentes à dominante bleue. On peut imaginer, mêlée à la satisfaction d’avoir accompli une prouesse jusque là inimaginable, une probable angoisse insidieuse dans le cœur des terriens. Car du point de vue où ils la considèrent, la planète Terre apparaît avec une évidence grave et lumineuse comme la seule petite oasis de vie dans un incommensurable désert astral et sidéral. (…) J’ai entendu dire que des cosmonautes russes et américains, réunis pour je ne sais quelle circonstance, éclairés par leur exceptionnelle expérience, s’affligeaient de l’inanité des querelles idéologiques, politiques, religieuses de l’espèce humaine dans le contexte d’une réalité qui devrait inspirer la solidarité la plus profonde et déterminée. » (p. 67-68)
(Tenter d’imaginer la course de notre planète dans l’espace est l’un de mes sujet de méditation favori, d’ailleurs. Et un des plus efficace, une sorte de méditation express, qui me recentre en quelques secondes chrono. Je ressens un grand coup de stress ? Pense au Cosmos, ma fille, pendant deux petites minutes. Ah, ces masses gigantesques de roche et de gaz lancées dans l’espace à toute berzingue... Puis reviens sur Terre : où ça, du stress ? Allons donc. Qu'est-ce qu'on est bien en place, sur le plancher des vaches ...😊)
Les écrits de Pierre Rabhi ne sont pas réjouissants. Mais ils ne sont pas tristes non plus. Sans doute grâce à cette hauteur de vue.
Pierre Rabhi se définit comme un paysan ; pour moi, il est avant tout philosophe. Ses pages sur la Conscience humaine comme reflet de la Beauté du monde, sa définition très poussée de l’Humanisme contemporain, tout cela le place dans une lignée de penseurs classiques et modernes - il en a d'ailleurs pleinement conscience et a lu ses classiques. 😊
Et l'éducation, dans tout cela ?
Et l'éducation, dans tout cela ?
« Dans l’ordre du possible constructeur d’humanisme, nous pouvons éduquer les enfants à la solidarité, au respect de la vie, à la gratitude, à la modération et à la beauté qui s’offre à profusion à notre admiration. On voit s’ériger des générations d’enfants qui faute d’un éveil à la vie sont réduits à n’être que des consommateurs insatiables, blasés et tristes. L’éducation ne semble pas prendre en compte les fantasques mutations du monde et la nécessité de préparer les générations à venir aux grands défis du temps présent. Une réforme profonde nécessiterait entre autres d’abandonner l’esprit de compétition pour la complémentarité et l’émulation, d’encourager le rapprochement avec la nature pour mieux la comprendre et la respecter, de réhabiliter le travail et l’intelligence des mains. » (p. 97)
L'éducation est bien sûr au cœur de la problématique humaine – l’a toujours été – et est présente, sous la plume de Pierre Rabhi, en filigrane, à chaque détour de phrase. Mais le paragraphe ci-dessus est le seul de l'ouvrage qui soit entièrement consacré à ce sujet, et l'un des seuls d'ailleurs qui offre des amorces de "solutions" pratiques.
Car à aucun moment l’auteur ne nous dit ce qu’il faut faire. Si vous cherchez des conseils sur la manière de mener votre vie, ce qu'il faut acheter, où il faut vivre, etc., passez votre chemin. Pierre Rabhi ne fait pas dans le "Faut qu'on/Y'a qu'à". Pierre Rabhi décrit, et dit : Voilà, tu sais maintenant. À vrai dire, tu le savais déjà. Tout le reste ne concerne que ta conscience.
Car à aucun moment l’auteur ne nous dit ce qu’il faut faire. Si vous cherchez des conseils sur la manière de mener votre vie, ce qu'il faut acheter, où il faut vivre, etc., passez votre chemin. Pierre Rabhi ne fait pas dans le "Faut qu'on/Y'a qu'à". Pierre Rabhi décrit, et dit : Voilà, tu sais maintenant. À vrai dire, tu le savais déjà. Tout le reste ne concerne que ta conscience.
« Par conscience, j’entends ce lieu intime où chaque être humain peut en toute liberté prendre la mesure de sa responsabilité à l’égard de la vie et définir les engagements actifs que lui inspire une véritable éthique de vie pour lui-même, pour ses semblables, pour la nature et pour les générations à venir. » (p. 11)
Hein qu'c'est dur, la Liberté ... 😶
No comments:
Post a Comment