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Du globe au planisphère (+ Printables)


Voici aujourd'hui une petite séquence de géographie à laquelle je tiens particulièrement. Voilà des années que je la propose à mes élèves, et j'étais très émue de la réaliser à la maison (ça grandit, ça grandit par ici !!). 😊

Cette activité permet à l'enfant de passer de la représentation sphérique, réaliste, de notre planète, à une représentation qui n'est pas sans problème, mais que nous utilisons néanmoins car elle est fort utile : la carte plane.

La représentation plane n'est pas sans poser problème, dis-je. Et l'objectif de cette séance est justement de le faire comprendre à l'enfant et, ainsi, de commencer à développer son esprit critique. C'est pourquoi il me semble qu'il ne faille pas la proposer trop tôt - à partir de 7 ans, c'est parfait. Bien sûr, chez nous, Louiselle, qui aura 6 ans dans une semaine, nous a rejoint et il n'était pas question de l'évincer !

C'est Antonin qui a initié cette activité, en se levant un matin avec une idée fixe :

ANTONIN, gonflé à bloc,

Maman, aujourd'hui, je vais dessiner une carte du monde, tout seul ! En traçant exactement les contours des continents comme ils sont en vrai !!

Réalisant soudain l'ampleur de la tâche,

Euh ... Tu m'aideras ?

MOI

D'accord, je t'aide. Va me chercher une orange. 

😊



"Voilà : on va dire que cette orange est notre planète. Elle flotte dans l'espace, elle tourne sur elle-même, elle tourne dans la cuisine - je veux dire, autour du soleil, bien sûr."

On laisse l'enfant manipuler librement le fruit quelques minutes, il peut s'amuser à mimer ses déplacement dans l'espace. Puis : 

"Ce qui nous intéresse, nous, c'est la peau de notre planète, sa croute terrestre, puisque c'est là que se trouvent les continents que nous voulons dessiner. Puisque notre dessin est plat, on va essayer de prélever cette peau sans l'abîmer et de la poser à plat sur notre table."

(On peut, à ce stade, tracer rapidement les continents sur la peau d'orange à l'aide d'un feutre. Ça s'efface au cours de la manipulation qui suit, mais cela peut aider à se représenter les choses si besoin. Et puis, c'est fun.)

Ici, je saisis un couteau et je suis les indications des enfants pour trancher la peau, puis je les aide à la détacher. Ils choisissent de découper l'orange en deux hémisphères nets (je pense que la représentation du planisphère Montessori, qu'ils ont manipulé dans ma classe, n'est pas étrangère à cette décision).

Nous obtenons donc deux dômes dodus sur la table de notre cuisine. Est-il possible de les aplatir ? Louiselle essaie, de manière très pragmatique :


Non, comme ça, ça ne marche pas bien. On abîme la peau en l'écrasant et puis le bombé se reforme rapidement lorsque la pression s'arrête. Peut-on imaginer une autre solution ?

On peut :


Antonin trouve très rapidement : il faut inciser le contour de chaque demi-sphère, jusqu'à ce qu'il accepte d'épouser une surface plane. Armés de ciseaux, les enfants entaillent donc chacun un hémisphère.

Bonne nouvelle ! Il est tout à fait possible d'aplanir notre globe terrestre pour obtenir une vision à plat.

Mauvaise nouvelle : la représentation obtenue n'a pas une forme pratique. Ce n'est pas rectangulaire. Ça ne rentre pas dans les livres. Il y a des "trous" sur les bords. 

Nous collectons dans la maison tous les planisphères dont nous disposons : cartes d'Atlas, puzzles, posters ... Tous s'inscrivent proprement dans un rectangle parfait. Comment est-ce possible ?

Nous dénichons cependant une exception ... dont la forme nous rappelle étrangement celle de notre peau d'orange ...

Projection de Goode (1923)

Nous parvenons à la conclusion suivante : pour représenter notre monde à plat dans un rectangle parfait, il faut tricher. Une carte rectangulaire est bien pratique, mais elle ne représente pas la réalité. Notre monde représenté ainsi est forcément déformé.

A ce stade, nous nous promenons sur Internet et nous comparons les trois principales projections cartographiques : celle de Mercator (1569), qui respecte les angles, mais pas les aires ; celle de Peters (1855), qui respecte les aires, mais pas les angles ; enfin, celle de Fuller (1954), de loin la plus satisfaisante, mais qui suppose de "faire un puzzle" dans sa tête. Elle ressemble un peu à notre peau d'orange, non ? 💛


Nous sommes fin prêts, à ce stade, pour dessiner notre planisphère. Nous savons que cela ne sera pas facile, voire impossible. Nous enveloppons notre globe rugueux de papier de soie - bien sûr, il y a des plis, et bien sûr, notre dessin sera déformé de ce fait. Nous sommes avertis ! 

Les enfants travaillent au pastel gras, en s'appliquant à suivre les reliefs du globe ...

Nous déplions le travail et observons le résultat. Certes, notre planète n'est pas aisée à reconnaitre dans ce dessin. Mais cette représentation-là en vaut une autre, et au moins elle est garantie "exempte de toute idéologie" ... 😉 Elle a la naïveté de l'enfance, et elle ne s'en tire pas trop mal !


Je trouve important d'exposer nos enfants à des représentations variées de notre planète. J'ai donc fabriqué des cartes de nomenclature qui reprennent les principales projections citées dans cet articles, mais aussi des cartes "géo-centreés" : centrée sur l'Europe, comme nous en avons l'habitude, mais aussi centrée sur le Japon ou l'Amérique du Nord. Personne n'est au centre du monde ! J'ai aussi inclus dans cet ensemble de cartes quelques représentations du monde connu à travers les âges : Antiquité, Moyen Âge et Temps modernes. 


Toutes ces cartes sont un régal pour mes enfants, qui s'appliquent à y repérer les différents continents et construisent une vision du monde plus riche que le sempiternel Mercator ne le permet. "Oh, mais l'Afrique, elle est graaaaande, en fait !", "Ha, oui, l'Asie et l'Amérique sont voisines, elles ont juste le Pacifique entre elles", "Mais le Pacifique, quand même, il est immense, c'est le plus grand océan du monde !", "Il y a beaucoup d'eau sur notre planète, bien plus de que de terre", etc.


J'espère qu'elles plairont à vos petits géographes ! 😊

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